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Photo Jack Guerrier 2018
Polo, jeans, baskets, regard ouvert, clope entre l’index et le majeur, souple encore malgré l’âge, Dominique s’est présenté à nous : « Je suis un grand clarinettiste ». Il nous a demandé « Si on voulait de la musique ». Bien entendu que nous en voulons de la musique, de la bonne, en live. Dominique tenait en main une clarinette en si bémol et en sale état. Tout ça se passait sur le parking face à l’océan. C’est là qu’il créchait Dominique, dans un vieux camping car, depuis deux bons mois d’après ses dires. Vingt cinq ans d’armée - un trou de mémoire - il était en retraite et avait prêté son argent à des copains de rencontre « Qui allaient lui rendre mercredi sans faute ! ». La semaine prochaine « Il serait riche ! ». Alors, il faisait la manche. Vingt euros par jour en jouant de la clarinette ou en chantant. Il entonna La vie en rose. C’était plutôt en rosse, tellement ça couinait. J’ai examiné sa clarinette Buffet-Crampon. Toute déglinguée, comme le bonhomme. - Elle a besoin d’un tamponnage et tout est coincé, comment pouvez-vous jouer avec un tel instrument ?- « Passez-la moi, vous allez entendre. » En soufflant dedans il a sorti d’horribles couacs, très gentiment. La semaine d’après, Dominique avait disparu.
Jack Guerrier